Alors après déjà près de deux semaines de la fin du SIJM 2008, voici enfin le compte rendu du jour 1, le 18 novembre, lorsque Fr002 et moi-même nous sommes rendus au Palais des Congès de Montréal pour vous ramener ce qui vous intéresse depuis la source, de la bouche de ceux qui font ces jeux sur lesquels on passe tellement de temps dans nos temps libres. On fait ça de façon moins formelle que l'an dernier pour éviter de vous assommer de propos mal rapportés par manque de notes et de détails, toutes ces petites choses qui, même très détaillées, ne remplacent pas d'avoir été présent sur place.
Quelques propos parmi les conférences de la journée :
Warren Spector
La récession impacte aussi l'industrie du jeu : des milliers de postes ont été supprimés au total dans différentes sociétés. Ceci dit, l'industrie du jeu est — malgré tout — à son meilleur depuis 4 ans, elle innove beaucoup plus maintenant qu'à l'époque : beaucoup de nouvelles licences ont eu du succès. Même si on ne le voit pas énormément dans le monde du FPS, mentionnons Left4Dead et Spore notamment, qui ont tous deux rencontré un franc succès. Selon Warren, l'industrie possède avenir prometteur, avec une croissance qui va continuer encore plusieurs années.
Jason Mitchell
était présent pour montrer comment Valve intègre des éléments de design dans le gameplay de leurs deux derniers FPS que nous connaissons bien : Team Fortress et Left4Dead :Team Fortress
- Les silhouettes ont une grande importance pour identifier les joueurs : elles permettent de repérer rapidement, même dans la pénombre, l'identité d'une personne.
- Les palettes de couleurs des décors et des personnages sont très différentes. Celles des décors sont très pastelles, douces et peu contrastées. En général, peu de couleurs sont utilisées de manière à pouvoir tout centrer autour d'un thème, ainsi que de la couleur du camp (le bleu ou le rouge).
- Pour rester cohérent avec le thème de couleurs, les décors ont été choisi en fonction du rouge et du bleu : pour le bleu, une couleur froide, on a par exemple une ferme industrialisée avec des composants plutôt métaliques, et une architecture à angles droits. Pour le rouge, une couleur chaude, le bois est beaucoup utilisé, et il y a des arrondis. De cette façon, les deux bases ont vraiment une identité visuelle unique et distincte.
Left4Dead
- Les silhouettes jouent toujours un rôle important dans Left4Dead, de même que les palettes de couleur. Elles permettent de différentier rapidement un joueur d'un zombie.
- L'animation, les mouvements, jouent aussi ce rôle.
- Les palettes de couleur ont aussi un rôle à jouer pour faire ressortir les éléments importants, tel qu'un medkit ou un personnage, qui ressortent des décors moins saturés en couleurs.
- La lumière, bien que peu présente, est autant que possible émise par des éléments in-game (ex: phares de voitures).
- L'utilisation de la lampe torche collée à l'arme n'est pas un choix innocent, il renforce l'importance du moment où on recharge l'arme, sachant qu'on perde la vue pendant un instant — instant qui parfois peut s'avérer crucial — et renforce le jeu qu'équipe, puisque joueur possède des faiblesses qui ont moins d'importance une fois en équipe.
- Left4Dead utilise une série de filtres pour donner un aspect réel, un peu comme dans les films. Un de ces filtres est un grain appliqué sur la vue, en fonction de la clarté. Plus c'est sombre, plus il y a de grain. Un deuxième filtre concerne les couleurs, une simple désaturation des couleurs en fonction des éléments : les décors le sont davantage que les personnages ou les trousses de soins. Il y a aussi un filtre utilisé pour renforcer les contrastes, inspiré par un effet aussi appliqué depuis très longtemps en peinture.
- L'utilisation des tons de couleur dans le gameplay, comme lors de la 3ième chute, où le joueur est au seuil de la mort : son écran devient monochrome pour sous-ligner l'état critique de la situation. La perception du son change aussi.
Stephane Morichere-Matte
décrit les étapes nécessaire pour créer un jeu multijoueur intéressant :- Il faut créer une carte jouable le plus tôt possible
- Dès qu'elle est jouable, il faut l'essayer, et faire venir des gens pour qu'elle soit essayée.
- Il faut porter une attention particulière à deux aspects :
- Le temps minimal avant de rencontrer un premier adversaire : le temps minimal pour rencontrer un adversaire une fois réapparu. Le plus long, plus le jeu perd du rythme.
- Le respawn time : le délai entre les respwans. Plus c'est rapide, plus il y a de l'action. En-dessous d'un certain temps, ça devient chaotique (Ceux qui ont essayé Quake 3 en deathmatch ...). Il faut que ce délai soit suffisamment court pour que l'adversaire ne puisse pas prendre trop avantage de la situation de manière irréversible.
- Pendant que le joueur est mort, il faut idéalement fournir des goodies pour lui permettre de profiter de ce laps de temps pour apprendre de ses erreurs, tel que de permettre au mort de voir comment ses coéquipiers jouent, ou alors, la fameuse camkill qui permet de voir comment on s'est fait tué (présente dans CoD4 notamment), ou encore la freecam, qui permet de se promener librement dans le level pour mieux apprendre la carte.
- Il faut identifier les goulots d'étranglement d'une carte, c'est à dire les points de passages où on observe une resserrement accentué des barrières physiques. C'est là qu'ont généralement lieu les combats : Il faut les placer stratégiquement, en fonction des objectifs, où les gens vont se rencontrer (tel que le drapeau dans un capture de flag ou un point de contrôle en domination) ou aux alentours de la pièce centrale en deathmatch par exemple.
- Porter une grande attention au HUD et aux tableaux de stats in-game, qui doivent permettre d'identifier rapidement qui mène et des informations importantes, telles que l'identité des joueurs présentement morts. Ça permet de donner des motivations aux joueurs pour combattre ceux qui mènent et essayer de gagner.
- Hors du jeu, donner la possibilité aux joueurs d'accéder à leurs stats pour renforcer la motivation de rejouer au jeu pour se dépasser.
Laura Fryer
parle de son métier de productrice et des qualités qu'il faut avoir pour mener à bien le projet. Il faut être extrêmement disponible, ne pas gueuler sur les gens, accueillir les problèmes avec une attitude de résolution de problème pour faire avancer le projet. Certains bugs, parfois, ne sont pas corrigés pour des raisons de complexité au niveau du développement ou des tests et de coûts. Par exemple, des bugs que l'équipe de test ne parvient pas à reproduire facilement et que, peut être, les utilisateurs ne rencontreront pas. Elle cite Gears of War en exemple, qui avait un tel bug qui n'a jamais été corrigé, et affirme qu'aucun test n'en a fait mention ; en même temps, peu de testeurs s'arrêtent sur les bugs, puisque sinon on ne s'arrêterait plus avec certains jeux. Elle a aussi exposé quelques photos d'elle avec des développeurs sortis dans un Karaoké pour se défouler et se connaître à l'extérieur du travail, et discuter avec les équipes. Cela, dit-elle, lui permet de découvrir les problèmes plus tôt et diminue les risques du projet, simplement en discutant avec ses équipes.Chris Hecker
On avait vu Chris l'an dernier à un keynote technique, un exercice de vulgarisation où il partait du triangle et se dirigeait ensuite vers la problématique de l'opposition entre la richesse visuelle et la difficulté de rendre un jeu interactif. Cette année, on change un peu de sujet, mais pas tant que ça finalement, puisqu'on s'attaque au contenu créé par les utilisateurs : forme d'interaction très complexe s'il en est. Pour donner une image au thème, Chris montre des dizaines de monstres créés dans Spore par par la communauté.
Ce succès, Spore le doit à son éditeur facile à utiliser. La mise à disposition d'outils accessibles à tous ont pour conséquence ultime d'avoir d'énormes impacts sur un jeu, puisqu'il y a une source illimitée de contenu, à l'échelle du nombre total de joueurs. Dans Spore pourtant, la soumission des créatures est sur une base volontaire. Pour créer la base du bestiaire de Spore, ils ont volontairement enregistré même les créatures qui n'ont pas été soumises sur la base volontaire, mais seulement celles qui étaient relativement primitives. Ces créatures primitives ont ensuite été utilisées pour enrichir l'univers de tous les joueurs.
Il y a deux approches pour la conception d'outils de génération de contenu pour utilisateurs. Spore est un opposé (très accessible) et à l'autre opposé, les total conversions où il faut écrire du code et faire des animations, des modèles 3D etc... et que chacun des deux côtés ont des avantages. Dans Spore, toutes les créatures partagent un squelette d'animation commun : ça leur a permis de créer facilement un système d'animation commun à toutes les créatures.
Chris incite les développeurs à réfléchir sur les possibilités du contenu créé par les utilisateurs. Selon lui, ça pourrait avoir un impact immense dans l'avenir, si c'est bien exploité (il cite Second Life comme un autre exemple de contenu généré par les utilisateurs, ou Counter-Strike, le plus célèbre mod (donc créé par des utilisateurs à la base) avec graphique à l'appui de sa popularité, comparé à Team Fortress ; et il rie un peu, disant qu'il est désolé pour Valve.
La présentation, de manière générale, était assez légère et informelle, et même amusante. Vers la fin, il montre comment certains joueurs ont exploité des bugs pour créer des créatures spéciales, avec notamment des membres complètement séparés du corps.
Guay Dominic
Voir article de Fr002Stéphane d'Astous
présentait en détails chaque étape depuis la création de l'initiative de créer un studio Eidos à Montréal il y a 18 mois : en passant par le recrutement, le choix du site, le design des lieux, les phases du chantier de construction, la création du site web, des revirements à l'interne chez Eidos et du côté du siège social et de la suite, et des objectifs de recrutement d'ici l'an prochain. De manière générale, c'était assez peu intéressant pour nous, mais on voit qu'ils tentent réellement de créer un studio où il fait bon vivre et travailler. Mentionnons tout de même que c'est avec un partenariat qu'ils ont pu ramener FEAR 2 jouable sur Xbox 360 que nous avons essayé à Arcadia, un merci différé s'impose. Ils organisent d'ailleurs des portes ouvertes pour permettre au public de voir à quoi ressemble leur studio. Ils n'a pas voulu parler du nouveau projet sur lequel ils travaillent, et on n'a rien appris sur Deus Ex 3. On espère bien entendu qu'il sera à la hauteur, ce qu'on devrait savoir assez tôt.Voilà pour la première journée ! Le jour 2 suivra prochainement. N'hésitez pas à commenter notre travail, notamment, à nous dire si ce genre de compte-rendus peut avoir de l'intérêt de votre perspective. Pour nous, c'était encore cette année une expérience très intéressante. On espère que le peu qu'on vous en ramène est suffisamment bien rapportés pour que vous puissiez en retirer au moins une partie de ce qu'on en retire en allant sur place.